Assurance-Vie/Fonds euros : le siphonnage des plus-values latentes par les fonds eurocroissance va perdurer 3 années de plus

La loi PACTE prévoit de faire la part belle aux fonds eurocroissance, souhait du gouvernement, bien plus que celui des épargnants. Les assureurs se sont engagés à décupler le volume de souscription en eurocroissance, en seulement deux années. Avec la promulgation du décret du 29 décembre 2018 autorisant le siphonnage des plus-values latentes des fonds euros au profit des fonds eurocroissance, l’on comprend mieux pourquoi les assureurs ont accepté un tel challenge.

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Vider la poche d’un fonds en euros pour garnir celle d’un fonds eurocroissance... Est-ce vraiment de la finance éthique et responsable ?

Elle n’est pas belle la finance des temps modernes ? Comment maquiller le rendement d’un fonds [a[eurocroissance]a] facilement ? Rien de plus simple, transférez les plus-values latentes d’un autre fonds, et le tour est joué ! Cela ressemble à de la petite cuisine entre amis, mais sur le principe, reste bien difficile à avaler par les épargnants.

Le décret n° 2018-1303 du 28 décembre 2018, publié au Journal officiel du 29 décembre 2018, prolonge pour trois années le dispositif temporaire qui autorise chaque organisme d’assurance à procéder au transfert d’une quote-part des plus-values latentes des [a[fonds euros]a] vers les fonds eurocroissance.

Fonds eurocroissance : se méfier des premiers taux intermédiaires, du marketing de premier ordre...

Le rendement d’un fonds eurocroissance ne peut-être connu qu’à son échéance. Les taux de rendement intermédiaires publiés par les assureurs n’ont donc aucune valeur, car ils ne représentent pas un rendement acquis au fonds. Les épargnants doivent rester méfiants et ne pas souscrire sur la base de ces derniers.

En clair, les assureurs souhaitant booster artificiellement les fonds eurocroissance dans leurs premières années, afin d’appâter les épargnants, ont latitude de dépouiller les autres épargnants ne misant que sur les fonds euros. C’est un scandale financier. Mais visiblement, cela ne choque pas grand monde dans les hautes sphères. C’est juste le casse du siècle, totalement légal. Alors les épargnants doivent-ils boycotter les assureurs proposant des fonds eurocroissance ? Non, car on ne peut savoir quelle est l’intention d’un assureur. Or ce dernier aura 3 années encore pour se décider.

Les fonds euros les plus "gras" les premiers concernés...

Par ailleurs, ce "siphonnage" des plus-values latentes porte essentiellement sur les fonds euros "gras", ceux qui gardent sous le pied un montant important de plus-values latentes, sans les réaliser. Au final, les assureurs n’en distribuent pas les fruits aux épargnants. Ce sont donc ces fonds euros moribonds servant des rendements pathétiques, dont les épargnants doivent, de toutes façons, se détourner au plus vite. Dans les faits, si les assureurs ont légalement 8 années pour redonner les provisions aux épargnants (partie des plus-values réalisées, mais en attente de redistribution), cette porte de sortie, ouverte de nouveau pendant 3 ans, pourrait inciter les assureurs à transférer les plus-values plutôt qu’à les réaliser. De leur coté, les épargnants pourraient bien regretter d’avoir miser sur un mauvais cheval, mais encore faudrait-il pouvoir connaître l’ampleur du manque à gagner.

Pour modérer ces propos, un soupçon agacés par ce principe, les autorités de contrôle vont sans doute surveiller les agissements des assureurs, afin que les épargnants ne soient pas trop largement lésés dans ce petit jeu de transferts de plus-values entre amis de bonne famille.

(Source : Journal Officiel n°301 du 29/12/2018. Décret n° 2018-1303 du 28 décembre 2018 modifiant le décret n° 2016-959 du 13 juillet 2016 relatif aux transferts d’actifs vers des engagements donnant lieu à constitution d’une provision de diversification)

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